Crymachina (version physique, v1.0.8, sortie le 27 octobre 2023), Développeur: FuRyu Corporation, Éditeur: NIS America

Développé par FuRyu Corporation, Crymachina (ou CRYMACHINA pour ceux qui n’ont pas peur des majuscules à outrance) est un action RPG dans la veine de ce qui sort du studio depuis de nombreuses années, c’est-à-dire qu’il peut y avoir un concept intéressant, mais pas forcément le budget qui va de paire avec les ambitions des développeurs. Et en règle général, c’est bien souvent l’ambiance visuelle (très épurée) qui est remisée au second plan…

Le scénario nous plonge dans un monde où l’espèce humaine n’est plus, suite à une extinction il y a deux millénaires causée par une maladie et par une guerre dont l’origine reste assez floue, et où les Dei Ex Machina (des êtres synthétiques au nombre de huit) ont été chargés de réintroduire l’humanité à bord d’une structure spatiale baptisée Eden. A noter que le terme s’écrit Deus Ex Machina au singulier, donc ne soyez pas étonnés de lire les deux expressions durant le jeu. Vous y incarnez Lebel Distel qui vient tout juste de sortir de son “sommeil” suite à une action d’une androïde nommée Enoa et qui va vite se trouver deux amies (Ami Shido et Mikoto Sengiku) et découvrir qu’elles sont désormais considérées comme des E.V.E., des êtres revenus à la vie à l’aide d’un Programme et possédant des fragments d’âmes d’humains décédés depuis des milliers d’années. L’univers est donc assez morose mais votre aventure ne va pas être de tout repos car votre mission ultime sera très vite dévoilée: trouver et détruire les Deus Ex Machina. Bien évidemment, tout cela se fera avec beaucoup de rencontres et des rebondissements comme à l’accoutumée avec ce studio…

Les niveaux sont assez plats, pas franchement inventifs, et très linéaires dans l’ensemble. Mais surtout, ils sont vides, que ce soit en terme de design, ou en terme de vie: c’est totalement insipide et quand on sait que la partie “Novel” devient très vite épuisante avec ses longueurs à n’en plus finir durant le Tea Time, on aurait bien aimé que l’aspect donjon soit plus amusant. Las, difficile de prendre du plaisir d’un côté ou de l’autre…

Fort heureusement, le chara-design des personnages est d’un tout autre niveau et il faut avouer que c’est probablement ce qui vous fera rester jusqu’à la fin, avec toujours cette envie de découvrir de nouveaux ennemis/boss qui vous feront décrocher la machoire. Il en est de même pour l’animation et la modélisation des protagonistes humains, tout bonnement somptueuse. Il est également possible d’utiliser le mode Photo pour vous éclater la rétine et garder de magnifiques souvenirs de votre aventure.

Et une fois n’est pas coutume, le gameplay type beat’em up dans les phases de donjon est vraiment excellent, très nerveux lors des affrontements, avec des attaques rapides ou puissantes, des esquives, des armes volantes, des contres/dash, voire l’utilisation d’attaques spéciales particulièrement dévastatrices. Cela devient très vite prenant d’enchainer les coups, mais attention aux attaques sournoises des ennemis car vous pouvez facilement mourir avec quelques coups bien placés. A noter qu’il est possible de mettre le jeu en mode Casual, qui réduira le nombre de PV des ennemis et rend plus simple les combats, mais bien évidemment, cela aura également un impact négatif sur ce que vous allez récupérer après chaque victoire. Un bémol en revanche sur cette partie puisque vos amies auront tendance à vous parler durant ces niveaux de type donjon, les textes s’affichant dans le coin haut-gauche de l’écran: il est quasi impossible d’avoir les yeux partout et vous risquez donc de passer à côté de quelques dialogues…

Au cours du scénario, vous serez également amenés à découvrir des donjons secrets (à débloquer via des codes) dans lesquels la finalité sera surtout de battre un énorme boss, mais avec de belles récompenses à la clé. Et comme l’essence même de ce genre de titres est de glaner des ressources/équipements et de gagner en expérience, ce sera forcément un passage obligé pour vitre le jeu à fond.

S’agissant d’un titre édité par NIS America, il faut bien évidemment s’attendre au bémol habituel, à savoir que le titre est uniquement proposé avec des doublages en japonais et des textes en anglais, ce qui en privera une bonne partie des joueurs francophones (qui pourront rétorquer qu’ils ont déjà un backlog assez conséquent à terminer). Un autre point négatif concerne les achats proposés sur eShop puisqu’il est possible d’acquérir différents costumes (militaire, maillot de bain) à des prix allant de 2,99 à 7,99 Euros. Sachant que le titre est sorti trois mois plus tôt au Japon, on aurait pu espérer que ces contenus soient inclus dans la version occidentale, ou qu’ils soient à minima proposés gratuitement en téléchargement (évitons de trop jouer sur les mots: il y a un costume offert sur l’eShop). A noter qu’il existe une édition à 79,99 Euros, baptisée Digital Deluxe Edition, proposant le jeu de base ainsi que de nombreux DLC (mais il faut vraiment être sûr d’accrocher au jeu).

D’un point de vue durée de vie, il vous faudra une vingtaine d’heures pour en voir le bout: cela peut paraitre correct pour ce type de jeu mais il faut bien comprendre que la moitié du temps sera consacrée à écouter les échanges entre les différents protagonistes, à farmer, et surtout à refaire bon nombre de donjons sur la fin tellement le niveau de difficulté subit un énorme bond en avant qui vous obligera à vous renforcer. Tout cela contribue bien évidemment à gonfler la durée de vie de manière artificielle, à tel point que l’on peut rapidement sombrer dans l’ennui et qu’il faudra une bonne dose de courage pour braver tous ces obstacles….

Au final, Crymachina ne faisait pas forcément partie de ces jeux attendus en fin d’année, mais il réussit tout de même à décevoir en ne sachant pas vraiment dans quelle catégorie se placer, et en nous proposant une créativité à deux niveaux: magnifique du côté du chara-design et totalement ratée pour les environnements. Le titre étant également très bavard, avec des termes parfois assez complexes, il est difficile de le recommander à des joueurs qui ne seraient pas vraiment à l’aise en anglais, l’éditeur ayant une fois de plus décidé de faire l’impasse sur une localisation française qui aurait peut-être permis de le faire plus connaitre aux yeux du grand public. Les amateurs de scénario science-fiction alambiqué seront toutefois aux anges et n’hésiteront pas à puiser dans leurs derniers retranchements afin de découvrir la véritable conclusion du titre, voire de profiter de son contenu supplémentaire. Dans l’idéal, on espère sincèrement que le studio pourra bénéficier d’un budget confortable et du temps adéquat à l’avenir afin de nous offrir un jeu digne de son talent : les développeurs ont une très bonne maitrise de certains aspects (scénario, chara-design, combats) mais cela ne permet pas forcément d’obtenir un grand jeu…

Crymachina Keyart
Crymachina (Switch)
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