Nobunaga’s Ambition : Awakening Complete Edition (version dématérialisée, v1.0.2, sortie le 5 juin 2025), Développeur: Kou Shibusawa, Éditeur: Koei Tecmo
Pas forcément connue ou reconnue en Europe, la série Nobunaga’s Ambition a fêté son quarantième anniversaire récemment puisque le premier épisode date de 1983. Depuis, cette série de jeux de stratégie au tour par tour dont le succès reste largement confiné au Japon, a connu de nombreux volets, jusqu’à ce Nobunaga’s Ambition : Awakening sorti initialement au Japon en 2022 et qui se voit désormais affubler d’un titre à rallonge pour sa sortie occidentale sur PS5 et Nintendo Switch 2, à savoir Nobunaga’s Ambition : Awakening Complete Edition.
Le titre vous propose de vous immerger dans l’époque des provinces en guerre avec des officiers prenant leurs propres décisions: c’est à vous de choisir la période à laquelle vous souhaitez débuter (avec des dates allant de 1534 à 1614), mais également le clan que vous souhaiterez mener à la victoire. N’étant pas forcément un joueur inconditionnel de la licence, force est de constater qu’il m’a fallu de très longues minutes afin de choisir au mieux mon point de départ: je vous conseille d’en faire de même car il serait dommage de tomber sur un duo période/clan trop difficile, ce qui pourrait vous dégouter du jeu et vous empêcher de poursuivre votre aventure. Le scénario, bien que basé sur des événements historiques, laisse une belle liberté d’action, permettant d’altérer le cours de l’histoire selon nos choix politiques, militaires ou diplomatiques. Vous êtes prévenus: le jeu est bien plus dense que ses prédécesseurs, mais également beaucoup plus accessible..
Tout d’abord, le jeu vient avec un grand nombre d’options de personnalisation, à commencer par le doublage qui est disponible en japonais ou en anglais (les textes sont uniquement en anglais, même si le jeu est très très bavard). Pour ma part, j’ai préféré prendre l’anglais, étant assez à l’aise avec la langue, quitte à perdre un peu en authenticité mais cela me permettait d’être plus concentré sur le reste. Mais il sera également possible de configurer des éléments de gameplay, comme la fréquence d’auto-save, la caméra, des éléments à afficher ou non à l’écran, la prise en charge de la fonctionnalité souris des Joy-con 2, la difficulté (sur six niveaux allant de « Very Easy » à « ExHard », en passant par une personnalisation totale) ou encore des éléments propres à l’histoire et au scénario. Bref, il y a de quoi faire en sorte que votre aventure soit la plus adaptée à votre niveau et à votre connaissance du genre. Il est même possible de changer les musiques qui seront jouées suivant les différents moments en jeu: en terme de personnalisation, c’est vraiment très poussé !
Graphiquement, Nobunaga’s Ambition : Awakening Complete Edition se montre propre sans être flamboyant. La carte du Japon est richement détaillée, les saisons défilent avec élégance, et les portraits 2D des personnages, façon estampes japonaises, apportent une belle touche d’authenticité. Le tout est lisible, même si l’interface peut sembler un peu austère pour les néophytes. Ne vous attendez pas à des batailles photo-réalistes ou à des cinématiques dignes des fameux « triple A ». Et pourtant, sous cette apparente modestie graphique, le jeu regorge de détails et d’élégance.
La carte du Japon, vue en plongée, est un vrai tableau vivant : montagnes, rivières, routes commerciales, châteaux et villages se dessinent avec finesse. Le passage des saisons modifie non seulement l’ambiance visuelle (teintes automnales, neiges hivernales), mais impacte aussi le gameplay; par exemple, en ralentissant les déplacements ou en modifiant la production des cultures. Les personnages sont représentés par de superbes portraits en 2D, dessinés dans un style inspiré des estampes traditionnelles. Cette direction artistique, sobre mais raffinée, renforce l’identité historique du titre. Enfin, les effets visuels lors des batailles ou des événements marquants (incendies, sièges, promotions, etc.) savent se faire discrets mais efficaces, en soulignant sans surcharger. L’esthétique est donc pleinement au service de la lisibilité et de l’immersion.
Au niveau de la jouabilité, le titre va vous demander une très grande adaptabilité si vous êtes un fin connaisseur des licences Total War ou Civilization par exemple, avec un degré de complexité bien supérieur. Ici, le cœur du jeu n’est pas dans les combats spectaculaires, mais dans la gestion à long terme, la diplomatie, la micro-gestion des territoires et l’optimisation des ressources humaines et matérielles. Chaque château que vous contrôlez peut être développé selon différents axes : production agricole, artisanat, commerce, entraînement militaire, fortifications, etc. Il faut recruter des officiers, leur confier des missions (construction, espionnage, gouvernance), entretenir des relations avec les clans voisins, nouer des alliances ou les trahir au moment opportun. Chaque tour devient un puzzle stratégique à résoudre, avec des dizaines de variables à prendre en compte.
Un des ajouts majeurs du titre réside dans la gestion des vassaux. En effet, vos officiers ne sont pas de simples pions exécutant vos ordres : ils possèdent désormais leur propre volonté, ambitions, voire rivalités internes. Certains peuvent vous désobéir ou provoquer des conflits internes si vous négligez leur loyauté, ce qui rend l’expérience plus vivante, mais aussi plus imprévisible. Les batailles, quant à elles, se déroulent sur des cartes en temps réel avec pause active. Elles mettent davantage l’accent sur le positionnement, les formations et les capacités spéciales de vos troupes que sur le nombre brut. Ce n’est pas la partie la plus spectaculaire du jeu, mais elle reste cohérente avec l’approche tactique de l’ensemble.
A noter que, bien que le titre du jeu « standard » porte le sobriquet « Complete Edition », il est toujours possible d’acheter l’édition collector pour 50 Euros de plus, afin de débloquer encore plus de contenus ! A noter que le jeu est tout de même plus « complet » que la version de 2023 puisque cette version inclut six scénarios supplémentaires, ainsi que tous les DLCs sortis lors des deux dernières années.
En revanche, difficile de conseiller ce jeu si vous jouez exclusivement en mode portable avec votre Nintendo Switch 2 car il y a pléthore de textes, pas forcément dans une taille confortable à lire en mode portable, et les parties peuvent durer tellement longtemps que votre batterie risque de tirer la langue avant même la fin d’un scénario.
Au final, Nobunaga’s Ambition: Awakening Complete Edition n’est pas un jeu qui cherche à plaire au plus grand nombre. Il s’adresse à une niche : celle des joueurs qui aiment réfléchir, planifier, optimiser, et s’immerger dans une fresque historique dense et exigeante. Pour ceux-là, c’est une réussite brillante, qui modernise sans trahir, et qui offre une richesse de gameplay rarement atteinte. Mais pour les autres, ceux qui veulent une stratégie rapide et accessible, le titre risque d’être un mur infranchissable puisqu’il faut jongler avec une multitude de systèmes, garder un œil sur de nombreux indicateurs et accepter une certaine lenteur dans la progression. Le jeu propose des tutoriels assez bien conçus pour poser les bases, mais le véritable apprentissage se fait sur le terrain, par l’expérimentation et l’erreur. Proposer ce jeu en tant que titre de lancement de la Nintendo Switch 2 est donc un pari risqué, mais c’est également une façon de forcer quelque peu la main aux joueurs cherchant à améliorer et diversifier leurs bibliothèques vidéoludiques. Les chiffres de vente permettront de vérifier assez rapidement si le pari n’était pas trop risqué, ce qui aura forcément un impact sur la sortie occidentale des prochains opus…